Le week-end dernier, Amiens a connu son premier acte à caractère homophobe. Dès lors, doit-on s’inquiéter d’un climat mortifère dans cette ancienne capitale administrative de région jusqu’ici préservée ?
Tags homophobes, quand tu t’inscris ! Depuis une semaine, les mots vont et viennent dans les médias pour qualifier cet acte d’une grande horreur. Durant le week-end du 23 au 24 novembre, un individu, vite identifié comme un jeune lycéen de 15 ans, a marqué sa haine anti-LGBTQI+ sur les murs de lieux communautaires et amis. La mairie d’Amiens Métropole (adresse administrative de l’asso Flash Our True Colors), le Red & White et l’antenne picarde de France Bleu. « Je compte en tout cas laisser les tags une quinzaine de jours. C’est un bar gay friendly où l’on prône la tolérance et l’inclusion. Ce genre de fait, cela montre bien que la lutte n’est pas terminée. », avait déclaré Victor Caron, patron de l’unique établissement gay-friendly.
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Jusqu’à présent, l’homophobie à Amiens n’avait qu’une faible voix dans les conversations informelles, sinon les médias. Des actes isolés visant à “casser du pédé”, avaient lieu, peu de journaux ne les mettaient en lumière. Pire encore, seule la nageuse Mélanie Hénique avait témoigné d’une agression dont elle avait fait les frais lorsqu’elle était avec sa copine, en 2014. Les auteurs n’avaient malheureusement jamais pu être identifiés. « J’ai reçu beaucoup de soutien de mes coéquipiers, comme Florent Manaudou et Jérémy Stravius, mais aussi de ma famille, de mes amis et des internautes. », nous avait-elle notamment confié au cours d’une d’une interview, en octobre 2019. Aujourd’hui, cependant, la honte et l’injustice semblent enfin changer de camp. Croisons les doigts !
Doit-on se réjouir d’une saisie judiciaire ?
Pour la première fois dans l’histoire amiénoise, l’identification d’un auteur va permettre l’ouverture d’une enquête, suivie d’une audience au tribunal. En cause, le jeune lycéen, sans antécédents, a reconnu l’intégralité des faits pour lesquels il est poursuivi. Pendant ce temps, les forces de l’ordre ont décelé des preuves irréfutables justifiant le geste de l’étudiant, au cours de leur perquisition. Découverte d’échanges sur des groupes anti-conformistes, conversations SMS et téléphoniques avec des personnes ayant des positions similaires aux siennes…
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La justice devrait porter l’affaire au parquet de la métropole « courant décembre ». Et ce, sur trois motifs : provocation publique à la commission d’un crime ou d’un délit, mais aussi à la haine ou à la violence en raison de l’orientation sexuelle, et dégradation grave du bien d’autrui et dégradation de biens publics. Les inscriptions devraient bien évidemment avoir une grande place au cours de l’audience. « Anti-pédé et fier », « cramée (sic) les pédales », « LGBT + alcool = décadence », « Un monde à purifier = des pédés à cramer ».
En tout cas, la seule hypothèse semble être du ressort d’une montée des mouvements réactionnaires et identitaires, notamment en lien avec le positionnement du polémiste Éric Zemmour. « La campagne électorale permet à la parole conservatrice de lancer des propos LGBTphobes dans un débat sur le prétendu ‘wokisme’. », a, entre autres choses, mentionné Matthieu Gatipon-Bachette, auprès de Têtu.
Une mobilisation efficace ?
Un rassemblement doit se tenir, mardi 30 novembre, à Amiens. Les activistes de Flash Our True Colors et les Bavardes, ainsi que leurs allié.e.s, vont marcher pour leurs droits et libertés. « Nous poursuivons notre lutte contre la discrimination avec détermination. À l’auteur des tags et ses sympathisants, nous adressons ceci : Nous, LGBTQI+, nous sommes partout, vous ne vous débarrasserez jamais de nous. Nous continuerons à |nous mobiliser] ! », a écrit sur Twitter l’association visée par cet acte. Dès lors, permettra-t-elle une réaction des pouvoirs publics, qui prendront enfin en charge ce grand fléau.